La prise de hauteur corrélée
à la préparation au cursus / concours
EdG Ecole de Guerre
C’est un fait, certains de ceux qui préparent ce cursus EDG termineront leur carriére aux plus hautes fonctions militaires. D’autres seront titulaires de chaires au sein des écoles militaires supérieures et des grandes écoles. De plus, plusieurs iront recouvir le foudre par l’épitoge à trois rangs d’hermine. Enfin, certains rejoindront la liste prestigieuse des Borda, Bougainville, Carnot, Cholesky, Delcambre, Fréminville, La Place, Lucas et tant d’autres. Mais tous seront brevetés et leur passage en Etat-major sera sanctionné par l’écriture de “papiers” publiés dans les revues savantes de l’institution.
Surtout, la mission de l’officier d’Etat-major s’inscrit dans l’élaboration et l’emploi des forces. Et cela, dans un monde de plus en plus compliqué et dans un contexte de plus en plus imprévisible.
Les déterminants conduisant à la situation actuelle sont multiples et unis par les liens de causalité et d’interdépendance, constituant ainsi un systéme dynamique non linéaire (SDNL) dont la caractéristique, intéressant au premier degré l’officier, est son caractére imprédictible.
S’y intéresser implique une approche multi-disciplinaire. Sciences dures ou molles, elles sont toutes présentes. Un léger survol des grands sujets actuels pointent des thématiques aussi variées que la violence, le communautarisme, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le réchauffement climatique, les pandémies, la laicïté, les migrations, les nouveaux espaces économiques, les économies classiques, les santés publiques, l’émergence d’un bloc dit du Sud, etc.
Le registre des disciplines, hors champ martial, qui couvrent ces thèmes est vaste: anthropologie, sociologie, démographie, géographie, histoire, économie, droit, politique, philosophie, épistémologie, théologie, physique, chimie, mécanique, mathématique, médecine et j’en oublie!
Il ne s’agit donc pas de les maîtriser, mais d’en posséder un vernis suffisament robuste pour pouvoir articuler un discours logique et pertinent, dans lequel toutes les sous-parties sont érigées sur des fondements théoriques et factuels indiscutables et de niveau conceptuel adéquat.
Une fois ce socle de savoirs acquis, il est alors nécessaire d’élever sa pensée, c’est à dire de prendre de la hauteur. Selon le dr Fourés “Prendre du recul » ou « prendre de la hauteur » sont en fait des techniques qui permettent de jauger une situation depuis différents angles, de sortir de l’engrenage de l’émotion ou de la pression qui nous submerge, et de reprendre le pouvoir”. Bien entendu, la condition indispensable consiste à pouvoir s’extraire émotionnellement du contexte, mais cette attitude est parfaitement maîtrisée par l’officier. Ensuite viennent l’appropriation des deux concepts que sont l’approche holistique et la pensée systémique.
- Le holisme est formalisé par le Gal Smuts en 1926. Il est défini comme “la tendance dans la nature à constituer des ensembles qui sont supérieurs à la somme de leurs parties, au travers de l’évolution créatrice”, cette derniére étant, selon le professeur Bergson, une “création permanente de nouveauté”.
- Par conséquent, le Holisme ontologique est pensé comme : “système de pensée pour lequel les caractéristiques d’un être ou d’un ensemble ne peuvent être connues que lorsqu’on le considère et l’appréhende dans son ensemble, dans sa totalité, et non pas quand on en étudie chaque partie séparément…À partir d’un certain seuil critique de complexité, les systèmes voient apparaître de nouvelles propriétés, dites propriétés émergentes. Celles-ci deviennent observables lorsqu’elles vont dans le sens d’une auto-organisation nouvelle. De là découle le point de vue selon lequel c’est le tout qui donne sens et valeur à ses parties par la fonction que celles-ci jouent en son sein.” Wikipédia
- L’analyse des événements actuels pourrait alors s’inscrire dans l’optique du holisme sociologique, défini comme méthode visant à “expliquer les faits sociaux par d’autres faits sociaux, dont les individus ne sont que des vecteurs passifs. Les comportements individuels sont socialement déterminés : la société exerce une contrainte (pouvoir de coercition) sur l’individu qui intériorise (ou « naturalise ») les principales règles et les respecte ……l’approche holiste en sciences humaines s’intéresse aux motivations et aux pratiques sociales des individus pris d’une manière collective au sein de la société. Elle considère que les faits sociaux doivent être expliqués en relation avec le groupe ou la société.. “Wikipédia
Voici qui rejoint le concept de culture . Durkheim explique que « La cause déterminante d’un fait social doit être recherchée par rapport aux faits sociaux antérieurs et non parmi les états de conscience individuelle ».
“En sociologie, les analyses holistes voient dans la société des contraintes qui assujettissent les individus. Toujours selon Durkheim, les actes individuels ne peuvent être expliqués que si l’on étudie la société et les normes sociales qu’elle impose à ses membres. Par l’éducation qu’il reçoit, l’individu intériorise des comportements, des façons de penser et de sentir, en somme toute une culture qui permettra d’expliquer ses agissements ou ses croyances. Pour eux, les goûts et toutes les autres pratiques sociales se construisent socialement” Wikipédia.
- La pensée systémique: ” discipline qui permet de percevoir les phénomènes dans leur totalité et de prendre conscience que chacun fait partie intégrante du système : chacun est influencé par le système et à son tour chacun influence également le système” Arnaud et Caruso Cahn.
- Changer une partie du système peut en affecter d’autres parties ou l’affecter en entier. Il est possible de prédire ces changements en étudiant les archétypes des comportements. Pour qu’un système apprenne et s’adapte, la croissance et le degré d’adaptation dépendent de son engagement dans l’environnement. Quelques systèmes en nourrissent d’autres, entretenant l’autre système pour en prévenir l’échec
“La pensée systémique s’inscrit dans la théorie sociologique des systèmes et étudie l’interdisciplinarité . Un système est un groupe de parties interreliées et interdépendantes, de façon naturelle ou fabriquée de main d’homme. Chaque système est limité dans le temps et dans l’espace, influencé par son environnement, défini dans sa structure et dans son objectif, et se manifeste par ses fonctionnalités. Un système peut être plus que ses parties lorsqu’il produit une synergie ou un comportement en émergence” Wikipédia.
Ainsi il est possible de prédire la possibilité d’un changement, mais non le résultat de celui-ci, ceci étant due à la nature type SDNL des phénoménes traités. Cette imprédictabilité est également renforcée par le concept de dépendance au sentier:
“La dépendance au sentier est souvent complétée par la notion d’effet de verrouillage (lock-in effect en anglais). L’effet de verrouillage, en tant que composante de la dépendance au sentier, désigne la propriété d’un systèmes dynamique dont les modèles séquentiels d’activité forment un « sillon » dont il devient difficile ensuite pour le système de s’écarter. L’effet de verrouillage est aussi parfois appelé verrouillage socio-technique, une situation dans laquelle des choix ou des événements historiques créent des mécanismes d’auto-renforcement qui rendent difficile ou coûteux le passage à d’autres options” Wikipédia.
“Ces mécanismes d’auto-renforcement conduisent à quatre propriétés du choix technologique :
- il existe une multiplicité d’équilibres et le résultat du processus dynamique ne peut être déterminé
- le résultat peut être inefficace (dans le cas où une technologie « meilleure » qu’une autre perd du fait de la malchance)
- il existe des phénomènes de verrouillage (une fois une solution atteinte, il est difficile d’en sortir).
- enfin, sous ces hypothèses, il existe des phénomènes de path dependence: de petits événements ou hasards peuvent déterminer des solutions, qui, une fois qu’elles dominent, conduisent à une trajectoire particulière.” Professeurs Ehrel et Palier, pour ce dernier point conf l’expérience des urnes de polya (thése doctorat pph).
Et c’est là que l’affaire devient passionnante:
“Il existe trois résultats d’efficacité possibles lorsque un processus dynamique présente une dépendance sensible aux conditions initiales.
- Tout d’abord, cette sensibilité peut ne causer aucun préjudice. Autrement dit, les actions initiales, peut-être insignifiantes, nous placent sur une voie qui ne peut être abandonnée sans certains coûts, mais cette voie se révèle être optimale (bien qu’elle ne soit pas nécessairement uniquement optimale). Par exemple, une décision capricieuse de séparer ses cheveux sur le côté gauche peut entraîner une vie entière de séparation sur le côté gauche, mais l’envie initiale de se séparer sur le côté gauche pourrait englober tout ce qui doit être pris en compte. A une échelle plus grande, une décision d’utiliser un système particulier pour alimenter les machines dans une usine peut exercer une influence décisive pendant des décennies, mais les effets à long terme de la décision peuvent être pleinement appréciés par le décideur initial et pleinement pris en compte. Nous appellerons les cas dans lesquels la sensibilité aux points de départ existe mais n’implique aucune inefficacité une dépendance de premier degré
- Lorsque l’information est imparfaite, une deuxième possibilité se présente. Dans ce cas, il est possible que les décisions efficaces n’apparaissent pas toujours comme efficaces a posteriori. Ici, l’infériorité d’un chemin choisi est inconnue au moment où une décision est prise, mais il est ensuite reconnu qu’un autre chemin aurait produit une plus grande richesse. Dans une telle situation, que nous appellerons une dépendance de deuxième degré, une dépendance sensible aux conditions initiales conduit à des résultats regrettables et coûteux à changer. Cependant, ils ne sont pas inefficaces dans un sens significatif, étant donné les limitations supposées de la connaissance.
- Liée à ce deuxième type de dépendance de chemin est la dépendance de troisième degré. Dans la dépendance de troisième degré, une dépendance sensible aux conditions initiales conduit à un résultat inefficace mais, dans ce cas, le résultat est également remédiable. Cela signifie qu’il existe ou a existé un arrangement réalisable pour reconnaître et atteindre un résultat préféré, mais ce résultat n’est pas obtenu.
Les trois types de dépendance de chemin présentent des revendications de plus en plus fortes. La dépendance de premier degré est une simple assertion d’une relation intertemporelle, sans aucune revendication implicite d’inefficacité. La dépendance de deuxième degré stipule que les effets intertemporels propagent une erreur. La dépendance de troisième degré exige non seulement que les effets intertemporels propagent une erreur, mais aussi que l’erreur ait été évitable.
L’essence de la distinction entre la dépendance de troisième degré et les formes plus faibles réside dans la disponibilité d’alternatives réalisables et enrichissantes par rapport aux allocations réelles, maintenant ou à un moment donné dans le passé. Les chemins pris sous une dépendance de premier et de deuxième degré ne peuvent pas être améliorés, compte tenu des alternatives disponibles et de l’état des connaissances. La dépendance de troisième degré, en revanche, suppose la faisabilité, en principe, d’améliorations du chemin. (Professeurs Liebowitz et Margolis traduction chat gpt)